L’abus de biens sociaux, une infraction pénale encore bien présente
L’abus de biens sociaux est une infraction pénale qui consiste, pour un dirigeant de société commerciale, à détourner ou utiliser de manière abusive les biens, le crédit, les pouvoirs ou les voix de la société, à des fins personnelles.
C’est un délit qui peut entraîner jusqu’à 5 ans de prison et 375 000 euros d’amende. Mais en pratique, peu de dirigeants sont condamnés à de la prison ferme.
Les conditions pour qualifier l’abus de biens sociaux
Pour que l’abus de biens sociaux soit constitué, il faut que plusieurs conditions soient réunies. Tout d’abord, il doit s’agir d’une société commerciale, comme une SARL, SA, SAS ou encore une société en commandite. Ensuite, le délit doit être commis par un dirigeant en exercice au sein de cette société, comme un gérant, PDG ou administrateur.
L’élément matériel consiste en un usage abusif des biens, du crédit, des pouvoirs ou des voix de la société, contraire à son intérêt. Par exemple, l’attribution de rémunérations excessives, ou la signature d’engagements hasardeux. L’élément moral réside dans l’intention du dirigeant d’agir pour son intérêt personnel, en pleine conscience de nuire à la société.
Bon à savoir : le délit d’abus de biens sociaux a été créé en 1935, en réaction à l’affaire Stavisky. Il est codifié aux articles L241-3 et L242-6 du Code de commerce.
Des sanctions théoriquement lourdes, mais peu appliquées
Le code de commerce prévoit une peine maximale de 5 ans de prison et 375 000 euros d’amende pour l’abus de biens sociaux. Mais dans les faits, peu de dirigeants écopent de prison ferme. Entre 1995 et 1999, seuls 15% des dirigeants reconnus coupables ont été condamnés à de la prison sans sursis.
La majorité a eu du sursis ou seulement une amende. « J’ai été condamné à payer une amende de 50 000 euros, mais je n’ai pas fait un jour de prison », témoigne G., dirigeant d’une PME reconnue coupable d’abus de biens sociaux. « C’était finalement un moindre mal ».
La prescription de l’action publique est de 3 ans, mais elle peut être plus longue s’il y a eu dissimulation. Malgré des sanctions théoriques lourdes, l’abus de biens sociaux reste donc un délit difficile à réprimer.
Ne pas confondre avec d’autres infractions voisines
L’abus de biens sociaux est une infraction spécifique, qu’il ne faut pas confondre avec l’abus de confiance ou la banqueroute. L’abus de confiance, passible des mêmes peines, concerne les détournements commis par toute personne ayant eu la libre disposition de biens. La banqueroute sanctionne spécifiquement les dirigeants de sociétés en cessation de paiements.
L’abus de biens sociaux se distingue par sa qualité d’infraction propre aux dirigeants de sociétés commerciales en activité. La notion de groupe peut parfois constituer un fait justificatif, si l’abus apparent sert en réalité l’intérêt du groupe. Par exemple, un transfert de fonds entre filiales peut se justifier pour sauver la société mère.
Un délit encore bien présent
Malgré des sanctions limitées, l’abus de biens sociaux reste un délit répandu. Entre 1995 et 1999, le nombre de condamnations a augmenté de 355 à 429 cas avérés.
La jurisprudence continue d’apporter des précisions sur certains aspects comme le délai de prescription. Bien que difficile à réprimer efficacement, l’abus de biens sociaux est donc une infraction encore bien présente de nos jours.
Les affaires politico-financières récentes, comme celle impliquant J.L., ont aussi mis en lumière l’utilisation de commissions et de financements occultes via des sociétés offshore. Ces scandales médiatisés ont fait évoluer la jurisprudence sur l’abus de biens sociaux, même si le délit reste difficile à prouver et sanctionner.
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